Journal
intime d'un personnage lié au Petit Boucher de St.
Cotton
Dans
le Petit boucher, Félicité raconte sa terrible histoire. Dans ces
journaux, les élèves ont imaginé la journal intime qu'aurait pu
tenir son enfant plusieurs années après les faits...
Bonjour
Ted 2, comment vas-tu ?
Lundi
18 juin 1998,
Aujourd’hui,
c’est mon anniversaire, j’ai 12 ans. J’ai reçu mon premier
cadeau qui est ce carnet. Je décide de t’appeler Ted comme mon
ourson en peluche, car il m’accompagne dans mes épreuves de tous
les jours, qui ne sont pas des meilleurs en ce moment d’ailleurs.
Après réflexion, tu vas t’appeler Ted 2.
Ted
2, je me présente : je m’appelle Gary, un garçon de petite
taille (cela en fait rire plus d’un) aux yeux bruns foncés, aux
cheveux noirs. J’habite dans un petit village perdu, pas loin d’une
grande ville où tout le monde s’y rend pour trouver du travail,
comme ma mère, il y a peu.
Ma
mère est une femme courageuse qui m’élève seule. Je ne connais
pas mon père, ni ma grand-mère, ni mon grand-père. Bref, je ne
connais personne de ma famille. J’ai déjà longuement réfléchi
et posé des questions à ma mère, mais toujours sans résultat,
elle évite le sujet comme une souris fuit un chat.
Je
suis très mal dans ma peau en ce moment et je ne sais pas trop
pourquoi, en fait si, il me manque quelque chose… un père, une
famille ou peut-être, tout simplement une vérité. Des réponses
aux questions que je me pose si souvent et qui restent toujours sans
réponse.
Aujourd’hui
j’ai entendu par hasard mon institutrice parler avec madame Heck
en disant que j’avais un problème psychologique parce que je n’ai
pas osé faire mon exposé devant la classe et les moqueries ont
continué. Cela commence à ne plus me toucher car elles durent
depuis des années, je me suis donc mis dans ma bulle. Au fond, c’est
là que je me sens le mieux !
Bonne
nuit , Ted 2.
Mardi
19 juin 1998,
Bonjour
Ted 2 comment vas-tu ?
Je
suis un peu perdu car aujourd’hui je suis allé au supermarché,
comme tous les mardis. Durant l’heure de marche pour s’y rendre,
ma mère ne m’a pas adressé un seul mot ! Une chose étrange
est arrivée. Un homme avec une moustache, vêtu d’un long tablier
blanc s’est approché de nous. Cet homme, je ne l’avais jamais
vu. Quand on l’a croisé, ma mère m’a pris directement par le
bras et on s’est éloigné de lui. Mais il a crié « Félicité,
c’est l’enfant ? » Ma mère a couru hors du
supermarché en chuchotant « il nous a retrouvés. » Sur
le chemin du retour, j’étais tout bouleversé à cause de cet
évènement, les questions se bousculaient dans ma tête. Ma mère ne
m’a toujours pas adressé la parole, sans doute était-elle trop
occupée à penser et à sangloter. Je ne sais pas ce que je dois
faire ? La consoler ? Lui parler ? Aide-moi, Ted 2,
pourquoi cela m’arrive t-il ? Je voudrais tellement mener une
vie normale … est-ce trop demander ?
Bonne
nuit Ted 2.
Mercredi
20 juin 1998,
Bonjour
Ted 2 comment vas-tu ?
Aujourd’hui,
j’ai posé des questions à ma mère, et, cette fois j’ai eu
droit à un bout de vérité, une toute petite phrase qui disait :
« Tout le monde m’a abandonnée à cause de toi et de
cet homme ». Ensuite, elle s’est remise à pleurer. Pendant
la nuit, je me suis relevé et j’ai vu une lettre sur son bureau
qui disait « Chère mère,
aujourd’hui ça fait 13 ans que vous m’avez laissée, que vous ne
voulez plus me voir, ni m’entendre. Vous affirmez que je suis la
honte de la famille. Pourtant tout ça n’est pas ma faute, vous
n’avez jamais voulu m’écouter.
J’ai
enfin trouvé le courage de vous écrire et de tout vous expliquer.
J’ai cette image qui me hante et qui a changé ma vie. Le fantôme
de cet homme avec une grosse moustache et ce long tablier blanc
hante en permanence mon esprit. J’étais sortie faire une promenade
quand cet homme m’a attrapé par derrière et … «
une larme avait dilué son dernier mot. Ma mère avait cessé
d’écrire laissant encore une fois planer le mystère. Cette lettre
était le début de mes recherches sur l’histoire de ma vie.
Bonne
nuit, Ted 2.
Jeudi
21 juin 1998,
Bonjour
Ted 2, comment vas-tu ?
J’ai
décidé de fouiller la chambre de ma mère. J’ai trouvé une photo
d’un homme bien apprêté, derrière on pouvait lire un prénom,
j’ai trouvé une photo de famille où ma mère était bras dessus,
bras dessous avec lui. Je me demande bien qui il est et ce qu’il
représente pour elle.
J’ai
ensuite décidé de me rendre au supermarché et de parler avec le
boucher. Je lui ai demandé qui il était et pourquoi il avait tenté
de parler à maman. Il m’a répondu qu’il tenait une boucherie
dans le village de ma mère il y a 13ans. Quand il a appris que ma
mère avait dû quitter le village, il a tout fait pour essayer de la
retrouver parce que il avait quelque chose d’important à lui dire.
J’allais lui demander des précisions, mais malheureusement notre
conversation a été interrompue par un client.
Demain
je parle à maman !
Bonne
nuit Ted 2.
Vendredi
22 juin 1998,
Bonjour
Ted 2, comment vas-tu ?
Moi,
ça ne va pas du tout, je pleure toutes les larmes de mon corps, j’ai
envie de crier ! Ma mère m’a enfin tout raconté. Elle m’a
dit que je devais le savoir à présent !
Ted
2, je suis un enfant qui n’a pas été désiré, pire je suis celui
qui a brisé la vie de la femme qui m’a justement donné la vie. Tu
veux savoir qui est mon père ? C’est ce fameux boucher.
Un soir d’automne, ma maman est allée se promener et le boucher ne
lui a pas laissé le choix, il l’a violée. C’est affreux...
comment est-ce possible ? A cause de cet horrible bonhomme, la
vie de ma mère a été anéantie, elle est devenue la honte de sa
famille. Ma pauvre mère a dû partir loin, très loin avec un enfant
qu’elle n’a pas désiré, et qu’elle n’aime pas car il lui
rappelle sans cesse cette triste journée qui a brisé sa vie. Je lui
ai demandé qui était cet homme bien sur la photo. Il s’appelle
Antonin, c’est l’homme qu’elle a aimé. D’ailleurs elle
l’aime toujours, mais il est malheureusement mort à présent.
Maintenant,
je comprends le comportement de ma mère envers moi, mais je n’y
suis pour rien moi ! Que puis-je faire pour lui venir en aide ?
Bonne
nuit Ted 2.
Samedi
23 juin 1998,
Bonjour
Ted 2 comment vas-tu ?
Ce
matin, le boucher est venu à la maison. Il a présenté ses excuses.
Il a expliqué qu’il avait été emporté par le désir. Il croit
qu’il suffit de venir dire ça pour que tout soit pardonné ?
Les paroles ne sont rien face aux actes ! Quand je pense que cet
homme, cette pourriture est mon père j’en ai des nausées !
Bonne
nuit Ted 2.
Dimanche
24 juin 1998,
Bonjour
Ted 2 comment vas-tu
Ma
mère a eu le courage d’aller trouver sa famille. Moi aussi j’ai
eu du mal à être apprécié dans la famille.
Ma
mère a retrouvé un homme dont elle tombée éperdument amoureuse et
ils se sont mariés. J’ai aussi rencontré une petite amie qui me
rend vraiment très heureux, enfin !
Quand
au boucher il a encore violé une jeune fille, mais cette fois, il
est en prison.
Comme
quoi la roue tourne. Tu sais, dans le fond de moi-même, j’ai
toujours su que tout allait s’arranger. Cela te semble impossible,
Ted 2? Tu te dis que je divague .. que tout ne peut se faire en un
jour .. Tu as vu juste ! Il ne s'agissait que d'un rêve, de mon
inaccessible étoile.
Un
lourd secret
Ceci
est un extrait du journal de Lili-Rose, une jeune fille de 16 ans,
qui raconte l'histoire tragique de sa mère. Lili-Rose a décidé de
publier son journal afin de faire part de la vie des jeunes filles
dans certains pays. Cet extrait est un hommage à sa mère, à qui
elle doit tout et à qui elle demande pardon pour tout ce qu'elle a
pu dire ou faire.
Lundi,
23 novembre 1995.
Cher
journal,
Aujourd'hui
c'était le jour-j. Rédaction sur l'un de nos parents.
Crois-moi,
j'ai ramé pour raconter l'histoire de ma maman. En même temps, je
n'avais pas le choix: je n'ai pas de père.
Bref,
cela fait un mois que cette rédaction est prévue, j'ai donc
interrogé ma mère tous les jours sur sa vie d'avant, ses origines,
ce qu'elle faisait là-bas. J'ai peiné à savoir certaines
informations. Elle ne parle pas beaucoup, ma mère, elle évite
toujours les sujets qui fâchent, comme son adolescence. Elle n'a
JAMAIS voulu m'en dire un mot.
D'ailleurs,
quand je lui demande de me parler de papa, elle change de sujet.
Elle
a honte de lui ? Il lui a fait du mal ? Il est parti en
courant quand il a su que ma mère était enceinte ? Et puis,
papa, comment il était ? Beau ou laid ? Grand ou petit ?
Comment se sont-ils rencontrés, lui et maman ?
Je
m'en pose tellement des questions, et j'en pose tant à maman aussi.
Je pense que je l'énerve parfois, mais j'ai 16 ans quoi, ça fait 16
ans que mes amies à l'école me parlent de leur père et que je les
écoute, envieuse.
Je
me demande comment serait mon papa avec moi. Je pleure parfois car,
même si je ne le connais pas, il me manque. J'aimerais tant le
rencontrer.
En
effet, je ne sais pas, moi, ce que c'est de vivre avec un homme. Ma
mère n'a jamais eu personne dans sa vie (en tout cas, pas à ma
connaissance) et moi je ne reste jamais longtemps avec « les
copains ».
Soit !
Grosse galère aujourd'hui : entendre les gens parler de leur
père, ma mère qui a anéanti ma rédaction...chouette journée.
Je
sens que j'aurai beaucoup de choses à te dire demain..bisous !
P.S :
Je mène ma petite enquête !
Mardi,
24 novembre 1995.
Cher
journal,
Hier
j'ai fait pleurer ma mère. Après t'avoir écrit, j'ai été manger
et elle m'a demandé comment s'était passé ma rédaction, celle qui
lui avait valu tant de questions. Elle m'a vexé. « Tant de
questions », je l'ennuie tant que ça ? Alors je lui ai
dit que si ça l'ennuyait autant de répondre à mes questions, elle
n'avait qu'à me présenter mon père ou alors elle n'avait qu'à me
répondre et pas en sauter six parce que madame ne sait pas parler.
C'est pas vrai ?!
Enfin,
là dessus, comme à chaque fois que « je pique une crise »,
elle m'a fait remarquer que je ressemblais à mon père dans ces
moments là. Comme elle joue les victimes quoi, ça m'énerve
parfois.
En
fin de soirée, j'ai quand même été demander pardon, je n'aime pas
être fâchée avec maman.
Merci d'être là
journal, tu m'aides beaucoup ! Bisous.
P.S :
Mon enquête n'avance pas du tout..
Mercredi,
25 novembre 1995.
Cher
journal,
Tu
ne devineras jamais ce que j'ai vu ! Ou plutôt entendu..
Ma
mère qui téléphonait, à un homme ! Elle lui proposait de
venir manger samedi soir, que l'on pourrait enfin faire les
présentations.
Mais
c'était qui au bout du fil ? Elle n'a pas d'amis masculins et
depuis que je suis là, au plus loin que je me souvienne, elle n'a
jamais ramené personne à la maison.
Je
n'aime pas imaginer que quelqu'un pourrait entrer dans la vie de
maman et donc dans la mienne. Je refuse, mais je ne peux pas en
parler à maman, car je l'ai espionnée. Je n'étais pas sensée
entendre cette conversation.
Enfin,
j'ai le temps d'arranger quelque chose pour que ça tombe à l'eau.
J'ai
peur journal, très peur.
Jeudi,
26 novembre 1995.
Cher
journal,
Comme
prévu, j'essaie de faire tout pour que la soirée de samedi tombe à
l'eau. J'ai proposé plusieurs choses à maman : un resto, un
ciné, ou même une soirée plateau télé mais c'est non, pour tout.
Tu
connais maman en même temps, quand elle a une idée en tête, elle
ne l'a pas autre part !
Bref,
la galère, je n'ai pas envie de voir cet homme. J'aurais presque
envie de m'arranger avec Charlotte pour aller passer la soirée ou
même la nuit chez elle. Ma mère n'aime pas que je déloge, mais
merde ! Je ne peux rien faire avec elle, je ne peux pas dormir
chez des amies, ni sortir, ni fréquenter des garçons, n'en parlons
pas ! C'est limite interdit. J'ai 16 ans, je suis majeure dans
deux ans et elle ne prend pour une gamine.
Enfin,
je m'éloigne du sujet. J'ai envie de fuguer juste pour ne pas
assister à cette soirée.
Aide moi mon
journal, je ne sais plus quoi faire.
P.S :
Je t'avoue que je laisse l'enquête sur mon père un peu de côté,
je m'y remets bientôt.
Vendredi,
27 novembre 1995.
Cher
journal,
Dernier
jour de la semaine, je devrais être contente que ce soit le week-end
mais non, même pas, je stresse à mort pour demain, pas parce que je
vais voir « l'homme » mais parce que Charlotte et moi, on
a monté un plan infaillible Tu veux que je te raconte ?
- Je dis à maman qu'il y a un match de basket à l'école et que je ne peux pas le rater car Lisa est la nouvelle mascotte.
- Charlotte et moi, on se rejoint dans le parc devant l'école et on va se promener avec les garçons.
- On rentre chez Charlotte vers 17h00, (je dirai à ma mère que le match commence à 16h00 jusqu'à 18h00, elle ne s’inquiétera pas de mon retard comme ça).
- Je passe la nuit chez Charlotte et je rentre le lendemain en mode : innocente.
Plan
d'attaque, je te dis !
Samedi,
28 novembre 1995.
Cher
journal,
Je
rentre..la queue entre les jambes..
Ma
mère est hors d'elle, on s'est engueulée !
Elle
s'est pointé à l'école à 20h00, pour voir si j'y étais et elle
ne m'a pas vu, du coup elle a essayé de me téléphoner, cinq fois !
J'ai quand même répondu pour finir, et je lui ai dit où j'étais,
pas le choix. Mais j'étais morte gênée. Elle m'a dit que mon
comportement était honteux et elle m'a ramenée à la maison.
Je
viens de monter dans ma chambre en ignorant l'homme (ouais, il était
toujours là), mais je voulais t'écrire !
Enfin,
je descends, ma mère m'appelle.
Je
t'embrasse.
Dimanche,
29 novembre 1995.
Cher
journal,
Je
ne sais même pas par où commencer..
Hier,
quand maman m'a appelée, c'était pour que je vienne souper, et dire
bonjour, jusque là rien de grave..
On
a mangé dans un silence de mort, trop spécial comme ambiance..
A
la fin du repas, maman m'a dit d'aller m'asseoir dans le salon, elle
avait l'air peureuse et triste, j'y suis allée sans discuter, elle
semblait appréhender quelque chose..je ne pouvais pas imaginer
combien elle avait raison. L'homme et ma mère m'ont rejointe et je
sentais que j'avais une boule au ventre.
Maman
m'a dit que l'homme (en fait il s'appelle Henri) avait quelque chose
à me dire de très important.
Alors,
il a commencé à parler, à me dire que je devrais être forte et
que je ne pouvais pas en vouloir à ma mère. En fait il était là
pour me parler de mon père..
Il
m'a dit que quand ma mère était jeune et qu'elle ne vivait pas
encore ici. Il a aussi évoqué un homme malveillant du village
faisait du mal aux jeunes filles.
Tout
le monde le surnommait « le petit boucher », rien que son
nom me fit froid dans le dos.
Ma
mère avait les yeux remplis de larmes, l'homme a continué à me
raconter cette histoire atroce ; le petit boucher violait des
femmes, sa cruauté et sa violence n'avaient d'égal que sa
méchanceté; il n'avait aucune pitié.
Ma
mère fut une de ses victimes. Je ne voulais pas y croire..Ma mère
pleurait, ces souvenirs la faisaient terriblement souffrir, chaque
mot ouvrait sa cicatrice et remuait la plaie.
L'homme
a terminé par me dire que quand maman s'était fait violer, elle
était tombée enceinte..de moi.
Mon
père était en fait un monstre sanguinaire sans foi ni loi. Mon père
est un être abjecte.
Je
suis écœurée de ce qu'il a fait à maman..
Cette
femme, ma mère, est une grande dame, et pour toujours je l'aimerai
et la soutiendrai...
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